Tuesday, March 2, 2010


FOPLADE- La veuve de l'ex-président du Rwanda a été libérée

Mots clés : RWANDA, Agathe Habyarimana
Par Thomas Vampouille
02/03/2010 |

Agathe Habyarimana, ici avec son mari Juvenal, lors d'une rencontre officielle à l'Elysée en 1977 avec le président français d'alors, Valery Giscard d'Estaing, et sa femme Anne-Aymone. Crédits photo : AFP
Objet d'un mandat d'arrêt international pour son rôle présumé dans le génocide de 1994, Agathe Habyarimana a été interpellée mardi en banlieue parisienne, puis libérée sous contrôle judiciaire.

Difficile de ne pas y voir une relation de cause à effet. Quelques jours après la visite de réconciliation de Nicolas Sarkozy à Kigali, Agathe Habyarimana, veuve du président rwandais assassiné en avril 1994, a été interpellée mardi à Courcouronnes, dans l'Essonne. Elle est soupçonnée d'avoir joué un rôle dans le génocide. Quelques heures plus tard, elle été remise en liberté et placée sous contrôle judiciaire.

Kigali réclame son extradition depuis 2004 et c'est sur la base d'un mandat d'arrêt international émis par les autorités rwandaises qu'elle aurait été arrêtée, de source proche du dossier. Une nouvelle qui sonne donc comme un gage de bonne volonté envers Kigali, dans un contexte de réchauffement des relations diplomatiques entres les deux pays, distendues depuis trois ans.

«Nous voulons que les responsables du génocide soient retrouvés et soient punis», avait déclaré Nicolas Sarkozy vendredi dernier, lors d'une conférence commune avec son homologue rwandais Paul Kagamé. «Est-ce qu'il y en a en France ? C'est à la justice de le dire. Nous venons de refuser l'asile politique à des personnes concernées et il y a une procédure judiciaire engagée», avait-il ajouté, faisant référence sans la citer à Agathe Habyarimana.

Trois demandes d'extradition vers Kigali refusées

Agathe Habyarimana est souvent présentée comme membre de l'«Akazu», le premier cercle du pouvoir qui a fomenté le génocide, ce qu'elle nie. L'attentat contre l'avion transportant son époux, le 6 avril 1994, est considéré comme le signal déclencheur du génocide, qui fit environ 800.000 morts.

Evacuée par des militaires français vers la France dès les premiers jours du génocide, la veuve du président assassiné était installée en France depuis 1998. En 2007, elle s'était en effet vu refuser sa demande d'asile - déposée en 2004 quand le Rwanda s'est lancé à sa poursuite - par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). Ce rejet avait ensuite été confirmé par la Commission des recours des réfugiés (devenue la Cour nationale du droit d'asile), en vertu des Conventions de Genève et pour son implication présumée dans la politique génocidaire du régime rwandais. Une décision définitivement validée en octobre dernier par le Conseil d'Etat.

«Son arrestation est une bonne nouvelle, parce que ça veut dire qu'elle ne restera pas impunie», analyse Michel Laval, avocat du Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR), joint par lefigaro.fr. En 2007, le collectif avait déposé une plainte à l'encontre de la veuve pour complicité de génocide «mais l'information judiciaire est au point mort», relève-t-il. «Enfin, on semble donc considérer son cas avec plus d'attention», se félicite l'avocat.

Reste pour la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris à statuer sur la demande d'extradition de Kigali. Si la justice française a autorisé l'extradition de plusieurs Rwandais soupçonnés d'être impliqués dans le génocide vers le Tribunal pénal international (TPIR) d'Arusha, elle s'est en revanche opposée à trois reprises à des extraditions vers Kigali, jugeant que la justice rwandaise n'était pas à même de garantir un «procès équitable» et l'accès à une justice indépendante. Il y a un mois, la cour d'appel de Bordeaux a décidé de renvoyer au 3 juin sa décision concernant la demande d'extradition à l'encontre d'un médecin rwandais accusé d'avoir participé au génocide. En tout, treize enquêtes contre des Rwandais ont été ouvertes par la justice française depuis 1995.


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